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PAR QUENTIN SEYNAEVE
RAP & ANIMATION : LES 2 MONDES SE RENCONTRENT
"Lorsque le rap et l'animation dénoncent"
Le rap a souvent dénoncé, notamment en France, où le phénomène musical des années fin 90 permettait aux jeunes des quartiers populaires d'évoquer l'insalubrité de leur ville, les violences policières ou encore la discrimination et le racisme.
Ces thématiques ont souvent fait réagir médiatiquement voire juridiquement comme en 2002 lorsque Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, attaque en justice le rappeur Hamé, membre du groupe "La Rumeur", pour diffamation après la publication d'un texte sur les brutalités policières.
Mais le monde de l'animation a-t-il aussi eu l'audace de pointer du doigt ces problèmes sociaux et sociétaux ? Ou du moins, la possibilité de pouvoir le faire ? Oui et non.
Ces dernières années, quelques réalisateurs soulignent l'addiction aux nouvelles technologies ou l'impact désastreux de l'activité humaine sur l'environnement.
Mais jamais un long métrage d'animation n'a pu aborder les mêmes sujets que ceux des rappeurs revendicateurs. Car cette technique cinématographique est injustement destinée aux enfants malgré les innombrables thèmes dits "adultes" abordés discrètement à travers quelques métaphores littéraires ou graphiques.
Et le problème est là, cela doit rester au dernier plan, car la dénonciation prendrait trop de place et pourrait tromper les familles venant voir un divertissement "pour enfants". Mais le rappeur Jay-z et le réalisateur Mark Romanek ont dérogé à la règle pour nous proposer le clip vidéo du morceau "The Story of OJ".
Dans ce clip, rien n'est laissé au hasard. Jay-z nous offre ses meilleurs conseils pour bien investir son argent afin de pouvoir léguer un bel héritage à ses enfants.
Mais à travers son texte et le clip, Jigga s'attaque de front à ce que signifie être un noir en Amérique moderne. En effet, Jay-z incarne une caricature cartoonesque des noirs, nommé "Jaybo". Les lèvres exagérément grossies, l'air nonchalant et à la main, un morceau de pastèque, tout cela était courant, lorsqu'il fallait représenter les noirs dans certains cartoons des années 40.
Dans ce clip, nous pouvons aussi y percevoir Nina Simone, chantant au piano. Jesse Owens, le bras tendu et la médaille autour du cou comme en 1936, lors des Jeux olympiques de Berlin. Une compétition où il remporta 4 médailles d'or sous les yeux d'Adolf Hitler.
Et O.J Simpson, le célèbre joueur noir de NFL, qui voit un de ses dires cité par Jay-z : "I am not black, i am O.J... Ok". La longue pause avant le "...Ok" montre clairement le mépris que le rappeur ressent envers le sportif qui rejetait sa couleur de peau au second plan.
"Lorsque le rap et l'animation s'associent"
Le rap est un concours d'égocentrisme depuis ses premiers pas. Lorsqu'il apparaît dans les ghettos afro-américains, il se veut dansant permettant à la population démunie de se divertir. Mais très vite, la nature de l'homme va surgir et les premiers rappeurs "égotrip" vont éclore. Sur la côte Ouest des Etats-unis, frimeurs en Lowrider chantent le soleil de Californie. Sur la côte Est, kickeurs munis de sampleur débitent avec des rimes affûtées. De par sa son flow, son style ou tout simplement ses paroles, le rappeur ne cherchera qu'à être le meilleur.
Mais pour l'animation est-ce le même objectif ? A vrai dire, non. Mais bon nombre d'entre nous, ce sont déjà imaginés un combat entre Son Goku et Super-man. Même si rien n'est souligné, cette volonté régulière de créer un être supérieur chez les créateurs de films/séries d'animation n'est pas anodine.
En effet, on voit souvent Spider-man vaincre ses opposants avec aisance, se permettant même quelques blagues. Et dans un autre registre, Bugs Bunny s'avèrent être quelqu'un d'invincible et particulièrement sadique. Et qui d'autre que Booba et Batman pour présenter un clip où les 2 protagonistes s'unifient ? FUUUUUUSION !
Il n'a pas grand chose à rajouter sur cette alliance, à part pourquoi la Warner et DC comics n'ont toujours pas collé un procès aux fesses du Duc de Boulogne ?
Ce qui est intéressant, c'est le choix du héros de la part de Booba.
Même si cela semble peu original, c'est avant tout bien pensé et en symbiose avec son temps.
Ces dernières années, de nombreux rappeurs sont apparus sans se dévoiler complètement. Bien sûr, ce n'est pas nouveau, Lino au début des années 2000 masquait son identité à l'aide d'un bonnet. Mais cultiver le mystère n'est pas chose aisée et souvent, les rappeurs loupent le coche en étant trop bavard.
Mais l'arrivée de PNL va donner une véritable leçon au rap français.
Les 2 frangins des Tarterets n'accordant aucune interview et de par une communication irréprochable vont réussir à créer l'événement à chacune de leur apparition.
Mais se faire rare n'est pas la seule façon d'éveiller l'intérêt de l'auditeur. Freeze Corleone - lui aussi, très discret - offre à son public un langage codé qui, une fois déchiffré, se concentre sur des théories du complot et autres. L'objectif avec ce genre de pratique est de construire un univers noir qui se marient si bien avec le mystère. Alors quel héros correspond à ces critères ? Vous avez déjà la réponse.
"Lorsque le rap et l'animation s'associent"
Si le rap et l'animation ont un point commun, c'est bien leur reçu par le grand public francophone. Et notamment l'animation japonaise qui comme le rap, réduit à sa violence, faisait trembler les parents inquiets que cela rende leur(s) enfant(s) ingérable(s) et idiot(s) jusqu'à la moelle.
En 1989, Ségolène Royale, alors députée des Deux-Sèvres, publie un essai nommé "Le ras-le-bol des bébés zappeurs" où elle s'attaque à l'émission "Le Club Dorothée ", grande pourvoyeuse des dessins animés japonais. Elle y exprime une certaine nostalgie envers les anciennes programmations où le gentil partait vainqueur sans avoir égratigné personne.
Heureusement, les jeunes ont préféré écouter les héros qui fonçaient dans le tas, conscients que pour atteindre ses objectifs, il faut parfois savoir faire des sacrifices.
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